Vendredi 29 février 2008
La tournée de Nicolas Sarkozy en Afrique du Sud a été marquée par l’annonce d’une redéfinition de la politique militaire française en Afrique. Les explications de Jean-Bernard Cadier.
Nicolas Sarkozy a officiellement achevé vendredi une visite d’Etat en Afrique du Sud, où il a exposé sa « nouvelle politique africaine » et installé sa nouvelle épouse dans son rôle de « première dame ».
Tout au long de sa visite, le président français s’est appuyé sur l’exemple de l’Afrique du Sud, première puissance économique du continent Africain 18 ans après l’abolition des lois d’apartheid en 1990, où la France espère notamment vendre ses réacteurs nucléaires de nouvelle génération (EPR).
« Quand je vois ce qui se passe au Zimbabwe et quand je vois ce qui se passe en Afrique du Sud, je me dis que l’exemple à suivre c’est quand même celui de l’Afrique du Sud », a-t-il dit à des journalistes à Johannesburg.
« Je ne veux pas opposer l’Afrique anglophone et l’Afrique francophone », a-t-il poursuivi. « Il y a l’Afrique dans son ensemble (…), ce milliard d’habitants qui doit espérer, qui doit croire en l’avenir, qui doit croire en la réconciliation, qui doit croire dans le développement. »
Au lendemain d’une étape de quelques heures au Tchad, un des pays de la « Françafrique », il a plaidé jeudi au Cap, devant le Parlement sud-africain, pour une « refondation » des relations franco-africaines et annoncé notamment la renégociation des accords de défense de la France avec huit pays africain.
Il a souligné qu’il avait choisi à dessein d’évoquer cette nouvelle politique dans un pays non francophone « pour montrer que la France a vocation à rayonner sur tout le continent ».
Quant à la renégociation des accords de défense avec les pays de la « Françafrique », elle ne signifie nullement un désengagement de la France, a-t-il expliqué à la communauté française de Johannesburg.
« Bien au contraire. La France va s’engager d’autant plus qu’elle aura eu le courage de lever le malentendu », a-t-il ajouté. « Il y a des pays qui souhaiteront qu’on reste avec une présence militaire, on restera. Il y en a d’autres qui souhaiteront qu’on évolue. Eh bien on évoluera. »
« La France a vocation à être en Afrique pas simplement par ses armées (mais) par sa culture, par sa langue, par son savoir faire économique, par l’investissement qu’elle va faire dans la formation des élites africaines, par la définition d’une nouvelle politique de l’immigration », a-t-il fait valoir.
Le message du chef de l’Etat français semble avoir été beaucoup mieux reçu en Afrique du Sud que lors de son voyage au Sénégal et au Gabon, en juillet dernier.
Il est vrai que dans son discours de jeudi au Parlement sud-africain, il s’est abstenu de reprendre les thèmes les plus controversés de son discours de Dakar sur « l’homme africain », qui n’était pas, selon lui « assez entré dans l’histoire ».
MEA CULPA ?
Salué par le président Thabo Mbeki – qui ne semble pas lui avoir tenu rigueur d’avoir confondu les All Blacks néo-zélandais et les Springboks sud-africains champions du monde de rugby en 2007 – le discours du Cap l’a aussi été par le président du principal parti au pouvoir en Afrique du Sud, l’African national congress (ANC), à l’issue d’une rencontre avec Nicolas Sarkozy.
« Je soutiens la position du Président Nicolas Sarkozy », a déclaré vendredi Jacob Zuma à des journalistes à l’issue d’un entretien avec le président français. « Il a soulevé un point très important : on ne peut pas envisager les relations entre l’Europe et l’Afrique avec le vieil état d’esprit colonial. »
Jacob Zuma brigue la succession de Thabo Mbeki, dont il est un grand rival, mais des soupçons de corruption et de fraude fiscale relayés par ses adversaires, pèsent sur lui.
La presse sud-africaine retenait aussi le projet de « refondation » des relations franco-africaines dans ses gros titres. « Sarkozy déclare une nouvelle ère dans les relations franco-africaines », titrait ainsi le « Cape Times ».
Nicolas Sarkozy a rejeté toute idée de reniement de son discours de Dakar, qui avait irrité la plupart des responsables africains – sauf Thabo Mbeki – mais esquissé un mea culpa.
Le discours du Cap est « le complément de celui de Dakar », a-t-il dit. « Mais sans doute que c’était de ma faute si le discours de Dakar n’a pas été immédiatement compris. » Ce voyage était aussi le premier déplacement officiel hors de France de Carla Bruni-Sarkozy.
Mercredi à N’Djamena, la chanteuse et ancienne mannequin d’origine italienne a rencontré la femme d’un opposant tchadien disparu et dîné avec plusieurs centaines de militaires français.
Au Cap, elle a visité dans un bidonville le siège d’une organisation non gouvernementale et accompagné Nicolas Sarkozy lors de la visite d’un centre de traitement du sida. Vendredi, elle a visité avec le chef de l’Etat la prison de Robben Island, où furent emprisonnés les principaux dirigeants du mouvement anti-apartheid, dont Nelson Mandela.
« A travers le monde entier, Nelson Mandela représente un espoir pour l’humanité. C’est un homme qui, après 28 ans de prison, dit qu’il faut pardonner à ceux qui l’ont oppressé », a expliqué le président après une visite à l’ancien président sud-africain. « Avec Carla, nous avons voulu venir à Johannesburg pour le rencontrer. »
Carla Bruni-Sarkozy a dit qu’elle envisageait d’accompagner son mari dans d’autres voyages. « J’espère pouvoir m’engager dans l’humanitaire. Il m’aide beaucoup pour cela », a-t-elle confié.
L’Elysée a fait savoir que « l’avion de la présidence de la République » avait décollé pour Paris en fin d’après midi mais sans préciser si le couple présientiel était à bord. En début de semaine, les autorités sud-africaines affirmaient que Nicolas et Carla Sarkozy prolongeraient leur visite officielle par une visite privée, ce que l’Elysée n’a pas confirmé.
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